D'accord. Cette fille était dégoutante.
Ame avait mit du temps à trouver ce qui pourrait briser toute une canalisation d'eau. Mais il avait réussit. Un bon coup de clé et c'était partie. Il avait fait ça dans les toilettes des filles, parce que sinon c'était pas drôle. Il avait choisi le bon moment, avec peu de monde en vue. Il s'était caché dans l'un des W.C, débout sur la cuvette, attendant la venue d'une victime. Celle-ci était arrivée, s'était installée, avait fait sa petite affaire, et était partie vers ... la sortie. Dieu, il existait des filles qui ignoraient le lavage de main ? Sauf que Ame, de là où il était, ignorait que la jeune fille avait remarqué la petite fuite d'eau très légère qui ferait tout exploser. Elle était maligne ... contrairement à l'autre qui entra avec violence et défonça tout ce qui se trouvait sur son passage : la fille innocente et le robinet. Ame se retint de rire et attendit un moment que la jeune inconnue s'énerve sur l'autre fille pour apparaitre : il ouvrit la porte des toilettes, et se jeta loin de la cuvette pour atterrir face à l'escrimeuse. « IT'S MEEEEE. MARIOOOO. Et je viens réparer vos TUYAAAAUX ! »
Long. Très long silence. La première fille les regarda un instant, pas sûre de ce qui était en train de se passer, puis elle finit par se jeter vers la porte pour sortir de là et courir loin de ce bordel. Parce qu'à l'heure actuelle, Ame avait dessiné une moustache au feutre, portait un bonnet rouge, et un T-shirt avec un vieux vêtement à bretelle : il ressemblait en tout point à Mario. Le sauveur de ces dames. Et autant dire qu'il profita bien de la vue que lui offrait un T-shirt mouillé.  

Le pire, c'est que tout ça se passait dans les toilettes, d'accord. Mais des toilettes à présent inondée par l'eau du robinet qui se projetait de manière très puissante. Le truc, c'est qu'il fallait juste remettre fermement le petit verrou servant à canaliser l'arrivée d'eau, et cela se situé juste en dessous du robinet. Simple ? Il fallait quand même une clé de douze pour arrêter ce massacre.
Ame se montrait face à cette jeune fille qu'il avait secrètement piégé, fier d'avoir l'air d'un héros auprès d'une fille. Qu'est ce qui l'avait poussé à faire ça déjà ? Ah oui, un pari avec un pote. En échange il aurait le droit à un mercenaire pour tuer son psychologue. C'était une image : juste qu'un élève plus gros et baraqué que lui se chargerait de faire un peu de bordel chez Mr. le psy Tokimasa. C'était pas très équitable, car ce "mercenaire", si choppé, en payerai un lourd prix. Mais en y pensant maintenant, Ame était dans la merde pour être arrivé chez les filles, comme ça, et avoir inondé la moitié des toilettes. « S'il vous plait, venez m'aider, je...je suis toute mouillée. » La voix le réveilla un peu de ses songes, et pas qu'un peu. Ame se mit littéralement à rougir et à devenir une tomate mario. Jouant le jeu, lui aussi sans le savoir, il se mit à sautiller et à arriver jusque le lavabo, attrapant sa clé en riant comme un idiot, ou comme un mario, pour le réparer avec un courage extraordinaire. Sans trop se tremper, il s'agenouilla et tira un bon coup sur le verrou pour le fermer, arrêtant l'eau de se verser abondamment. Fier de sa réussite, il se releva et montra à la jeune inconnue ses beaux muscles. « Mamamia ! Mais ouwi c'est vrai que vous êtes toute mouillée, qu'est-ce qu'un plombier comme môa peut faire pour vous aider ? » Il s'approcha alors dangereusement de Rosalie, sans savoir qui elle était vraiment en réalité.

Elle avait touché ses beaux muscles. Et maintenant elle venait poser son visage trempé sur son T-shirt rouge. Ame ne savait pas si il fallait la virer pour avoir salit autant son beau T-shirt d'amour, ou si il fallait en profiter pour lui faire des avances. Cette fille a l'air bien taquine. Un peu trop taquine. Ame l'avait déjà vu dans les couloirs ou en train de manger, mais ne lui avait jamais vraiment adressé la parole. Elle avait une réputation dans ce lycée, celle d'être autant un garçon manquée que Yona, la sportive de seconde zone. Et aussi de ne jamais se laisser faire par les hommes. « Mon uniforme est trempé... » Ame la regardait à présent dans les yeux. Elle avait un drôle de physique : des cheveux très clairs, des yeux presque rouges, une cicatrice près du menton, et un regard bien mauvais. Mieux valait se méfier des filles de son genre, que les garçons le pensent ou non, les filles sont dangereuses. Et quand une fille te fait à ce point envie, c'est qu'il y a quelque chose derrière.
Ame prit alors son air évasif, à la limite du sérieux dans son rôle de mario, et continua avec sa voix italienne à la limite du mafieux : « Je le vois bien qué vous êtes trempée. Maah, c'est qué je souis juste plombier, yé peux rien faire d'autre ! » Il leva ses épaules, l'air de s'excuser, mais avec un sourire taquin au coin du visage. « Moi, yé né sauve que lé princesses. Et vous n'êtes pas oune princesse, vous n'en awez pas l'allure. » Ame, tu es méchant quand tu t'y met.  

« Alors...Tu ne vas pas me sauver ? » Oui c'est ça, t'as compris l'idée, t'es pas si con que ça, j'allais finir par le croire. Ame eut un petit sourire en coin, ne répondant pas à la question. Elle semblait ... perturbée. Déçue qu'il ne la sauve pas ? Ame avait fréquenté de filles pour savoir qu'elles étaient toutes dangereuses. Même parfois la plus douce des colombes peut avoir la peau noir derrière son plumage blanc. Ame l'avait reconnu, enfin, il était temps. Rosalie, peu importe le nom de famille, elle faisait du combat et en particulier de l'escrime. Mieux valait ne pas trop s'approcher d'elle et la toucher. Ame ne sait pas se battre. « J'aimerai bien savoir qui ce cache derrière cette moustache, quand même. » Trop curieuse, c'est looouche. Ame s'amusa à faire semblant de se tripoter la moustache, un petit air fou sur le visage : « Je suis Mario, personne d'autre ! » Il eut un petit rire crispé, puis s'arrêta finalement de jouer la comédie, voyant que le défi avait été relevé et que sa mascarade ne servait plus à rien. Elle avait le droit de savoir, non ?
Ame enleva alors son bonnet pour laisser sa tête respirer. Ses cheveux blonds étaient tout en pagailles, ébouriffés et un peu transpirant. Il faisait chaud dans ce bonnet. Il eut presque un petit sourire mignon envers Rosalie, mais c'était un faux bien évidemment : « Est-ce que ma tête te dit quelque chose ? »

Ame avait ôté son bonnet et l'avait mit dans la poche de sa salopette. Il ne ressemblait plus trop à ce Mario sorti tout droit d'un jeu vidéo. Il était Ame Koyoshi à présent, et même sa voix et son rire avait changé. L'atmosphère devenait lourde. Car la jeune fille avait osé demandé ce qui se cachait derrière cette moustache. Ame est loin d'être un joli cœur. Elle allait voir. « Tu pensais que j'allais me faire avoir comme les autres ? Dommage. » Son souffle, il le sentait contre son oreille. Elle était là, tout proche de lui. Et Ame n'allait pas la laisser partir sans recevoir quelque chose. Il avait envie de jouer. Pas à Mario. Un tout autre jeu peut être plus amusant encore pour lui, mais peut être moins pour elle.
Il commença à marcher autour d'elle, comme un prédateur : « Ne prend pas tout ça pour une affaire personnelle. Après tout ... Tu étais juste là au mauvais endroit au mauvais moment. » Il lui souriait, mais pas de façon très sympathique. C'était même inquiétant, et seul le bruit de leur respiration et celui de des goutes d'eau du robinet qui coulent arrêtait ce long silence gênant. Soudain, Ame attrapa par les bras la jeune fille et la plaqua violemment contre le lavabo. Il avait puisé toute sa force dans ce geste, et il tenta de ne pas montrer une faiblesse. « Tu veux être différentes des autres à mes yeux ? ... Mais on ne se connait à peine toi et moi. » Le regard mauvais, voilà ce qu'il avait. Il préparait un sale coup.  

Ame la tenait fermement. Mais peut être pas pour longtemps. Car il ne pouvait rien faire d'autre que lui tordre le dos contre le lavabo, et lui tenir les bras pour qu'elle ne bouge plus. Elle avait de la force, ça se sentait dans sa façon de se débattre. « Lâche moi !! » La peur dans son visage excita de suite Ame, mais il se retint de faire quoique ce soit de plus. Tout en gardant la même position et la pression sur les bras de la jeune fille, il lui lança comme pour la rassurer un peu : « T'en fais pas ma colombe, je ne fais rien aux filles. Je ne suis pas un aussi gros connard qu'on le pense. » Ame finit par la lâcher, un peu idiot de faire ça, mais il le fit sans attendre. Il recula un peu pour l'observer un instant, puis il croisa les bras, toujours son air mauvais sur le visage. Étrangement il ressemblait à un monstre. « Tu pourrais être dangereuse Rosalie. Le problème c'est que tu n'as personne avec toi. » Puis il s'arrêta, brusquement. Puis ses joues gonflèrent et il se mit à rire très fort. Quitte à se faire repérer il était encore mieux que les cries de Rosalie lui ordonnant de la lâcher. « Allez, fais pas cette tête ! C'était pour rire ! »

Non, en effet. Rosalie n'était pas une blanche colombe. Et Rosalie ne lui appartenait pas. Pour l'instant en tout cas.
Ame la regardait sans rien dire, attendant une réaction. Mais elle finit par le regarder avec ce regard plein de haine. Elle n'était pas méchante. Ame était presque déçu. Il pensait que la grande et imposante Rosalie ne se laisserait pas faire, comme disent les rumeurs à son sujet. Mais non. Il pourra facilement contourner ces rumeurs. Rosalie a beau n'avoir besoin de personne, se défendre seule est difficile. L'exemple est là. « Ne m'approche plus. Plus jamais. » Et elle partit. Ame s'empressa de sortir lui aussi des toilettes avant que des filles viennent et le repère. Il vit Rosalie dans le couloir et lui lança alors d'une voix forte : « Je ne serais jamais loin. Cette école est plus petite que tu ne le pense ! » Et encore son rire retentit, avant qu'il ne parte de l'autre côté.